Love Song Requiem ❛ PV Elendil ❜

Love Song Requiem

So tell me why, darling.

L'océan
Ses vagues. Son mouvement lancinant. Il n'y a rien qui détende davantage. Rien qui procure de telles sensations. Un apaisement instantané, dès que les embruns salins commencent à danser dans la brise tiède. Ça aurait pu être un matin comme les autres. Ça aurait sûrement dû l'être.
Heaven réprime un bâillement. Ici, son rôle n'a plus d'importance. Son existence elle-même n'est qu'un vague souvenir qui ne trouble pas le monde.
L'océan.
Ses vagues. Ses doigts aqueux qui se tendent vers les berges jusqu'à les écraser de sa puissance. Il paraît plutôt serein, en ce jour brûlant. Les remous qu'il forme sont légers, effleurant le bout de ses griffes, et l'albâtre de son pelage se détache à peine du sable immaculé. Toutes les nuances du liquide se reflète dans son regard mouillé, témoignant de quelques émois qui peinent son palpitant fatigué.
Et, dans un ultime espoir d'appelé un être disparu, les lèvres noirâtres forment des syllabes silencieuses. Elles réitèrent cet appel déchirant, sans parvenir à produire le moindre son. Sa douleur est comparable à une maladie qui gangrène dans ses entrailles. L'estomac, retourné. Le cœur, abîmé. Les iris, cramés. Les cils, trempés. La voix, laminée. Son corps réclame grâce, et son âme refuse de rendre les armes.
Pourquoi ? Pour eux.
Pour ces êtres adorés, la dame d'ivoire s'empêche de penser à autre chose qu'à ce souffle saccadé qui déchire sa trachée. L'eau commence à se mouvoir, dans son déplacement sinueux et hasardeux. Comme si, dans son mystère imperméable aux Lupus, la mer n'avait aucun sens. Elle s'avance et recule à son gré et celui des autres, sans même se soucier d'une logique quelconque.
Et, éternellement, il semble à l'Alpha que l'océan ne fait que répondre à ses questions. Indolent. Tranquille.
Il susurre que le monde continue de tourner, et que rien n'explique qu'un Loup isolé se morfonde sur des évènements passés. Enterrés avec leurs silhouettes noyées.
Ses iris se détache un instant de l'océan, découvrant son reflet cyan. Les cieux sont dégagés. Pas un nuage. Pas une ombre. Un peu tristement, Paradis comprend que, malgré ce jour funeste qui est marqué année après année par ce deuil qu'elle ne parvient pas à faire, le monde est égal à lui-même. Qu'il ne s'attarde pas sur les décès, et poursuit sa route.

Sûrement pour se réconforter, une silhouette prend vie dans l'océan. Puis, une deuxième. Une troisième. Et finalement, une quatrième. Immatérielles. Translucides.
Des loups. Des fantômes d'un passé révolu, et d'une époque qui s'est voulu plus difficile que prévu. Mais, sa mère n'avait eu cesse de le répéter, sa précieuse progéniture aurait une existence plus éprouvante encore que la sienne. Ils s'avancent lentement vers la môme esseulée. Vers l'adulte qui redevient enfant sous les yeux de ces loups qui n'ont pas changé.
Qui retrouve son regard de môme terrifié en remarquant qu'ils ne sont pas plus réels et tangibles que ne le sont les souvenirs.

« Je suis désolée, maman. »

L'une des silhouettes esquissent un sourire qui se décompose, lâchant quelques gouttelettes diaphanes qui retombent mollement dans l'écume. Ils sont comme autrefois, inchangés malgré les années. Un père qui a été lâchement évincé, après avoir volé l'objet des désirs d'un autre. Un frère minuscule, aux yeux semblables aux profondeurs des océans. Une sœur à la fourrure agrémentée de quelques poissons argentés. Une mère qui a préféré le précipice plutôt que d'élever la dernière de cette famille. L'unique survivante d'un drame. La seule rescapée d'une histoire inachevée.

« Je suis vraiment désolée. »

Elle aurait aimé les sauver. Être le messie et posséder des dons incroyables. Mais son seul pouvoir consiste à les faire revivre tels qu'ils étaient dans ses souvenirs brumeux, et sûrement pas à ramener ceux qui ont déjà poussé les portes du Paradis auprès de ceux qui s'ingénient à combattre chaque jour que les Fondateurs font.
Puis, un bruissement détonne et Heaven se retourne vitement. Les silhouettes retombent, à son grand damne, et la Meute qu'ils formaient est de nouveau dissolu. C'est un peu comme perdre son identité à chaque espoir qui renaît, et qui sombre dans les abysses.

« Qui est là ? »

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